John Parot Art
Mode de vie

L’art visionnaire de John Parot

Les collectionneurs et les marchands d’art convoitent les œuvres de cet artiste californien.

En art, la subtilité prend souvent un poids démesuré. Dans les grandes galeries du monde, la plupart du temps, minimiser n’est pas synonyme d’élévation. Parfois, un minimalisme exagéré révèle simplement que l’artiste a pris un raccourci en misant sur quelques motifs ou une combinaison de couleurs qui n’arrivent pas à transcender un message – ni à attirer le regard, à charmer l’esprit ou à conquérir les cœurs. Ce qui n’est aucunement le cas de l’artiste John Parot. Dégageant une certaine exubérance, une pratique instinctive et un grand savoir-faire, les dessins et les tableaux colorés de M. Parot – qui a fréquemment recours à des formes géométriques et à de puissantes couleurs – sont recherchés. En plus d’être louangé par The New Yorker, le Los Angeles Times et le Chicago Tribune pour sa façon de se distinguer dans une mer de similitude, M. Parot s’est acquis une nouvelle clientèle de collectionneurs désireux de se procurer ses œuvres.

Cela dit, selon l’artiste, il lui faut des mois et parfois des années pour créer une œuvre, car il choisit et modifie soigneusement ses palettes de couleurs. « Je mélange méticuleusement toutes mes teintes à la main pour que les nuances et les contrastes soient bien nets, explique M. Parot de sa résidence de Los Angeles. J’utilise aussi une peinture permanente spéciale qui ne s’estompera pas, car je veux que ces créations me survivent longtemps. » Il s’inspire de tableaux miniatures indiens datant de 750 ans apr. J.-C. pour choisir ses teintes. « Je cherche toujours à reproduire une telle sorte de qualité intemporelle, mais irisée, précise-t-il. Eh bien... Ça et à mettre ma propre touche dans chaque toile. »

John Parot Art
4 Oranges, Melbourne Avenue. Crayons de couleur, crayon et gouache sur papier. Courtoisie de l'artiste. (Photo de Darrin Noble)

La Californie lui servant de source d’inspiration, ses plus récents dessins, collages et tableaux reflètent l’urgence et la vitalité des environs. Dans ses dernières œuvres, intitulées la Orange Series, il réinvente la flore typique du sud de la Californie, notamment celle de Silver Lake, de Malibu et de Los Feliz. Son processus créatif l’appelle à passer des heures à observer le paysage, du lever au coucher du soleil, et à faire des croquis. « Los Angeles est un paradis pour un artiste, raconte-t-il. Les perspectives se juxtaposent de façon retentissante dans cette métropole comme nulle part ailleurs; l’énergie débordante de cette grande ville se déploie sur un magnifique arrière-fond tropical. La luxuriante végétation y côtoie des éléments visuels audacieux – les gigantesques panneaux d’affichage d’Hollywood aux lumières vives et aux polices de caractère stylisées se mêlent aux somptueux citrus et palmiers. Cet assemblage en dit long sur les désirs tant naturels qu’immodérés qui abondent dans la ville de L. A. »

Sa façon cérébrale d’approcher l’environnement abondant de la Californie confère à l’artiste une sorte d’aura légendaire – et mystique. Cette aura repose aussi en partie sur sa façon d’exposer ses œuvres. Ses toutes premières expositions ont eu lieu dans d’éminentes institutions, comme le Museum of Contemporary Art de Chicago et le Frieze New York, mais, maintenant, M. Parot présente essentiellement le fruit de son travail lors des événements de style « atelier à entrée libre » qu’il organise lui-même. Lors de ces rendez-vous exclusifs et intimes, M. Parot invite personnellement des collectionneurs dans son atelier pour qu’ils y découvrent son processus, ses tableaux d’ambiance et ses influences. Ils dénicheront dans les archives de leur hôte des piles de magazines de design intérieur des années 70, des photos de décors néo-minimalistes, une variété de couvertures en laine de Pendleton, des échantillons de carreaux de céramique marocaine, de vieilles publicités de Gucci et de Missoni, ainsi que, au centre de l’atelier, une reproduction d’une œuvre de la série de papiers découpés d’Henri Matisse représentant une tomate rouge. Quand il est coincé, il se tourne vers deux de ses idoles qui ont vécu les hauts et les bas des beaux-arts : des sommités comme le designer de meubles et modéliste en textiles Alexander Girard (« Il m’a appris qu’il était possible de vivre sa créativité sur différents plans. ») et l’artiste Joyce Kozloff, une ancienne professeure d’art à la Skowhegan School of Painting and Drawing et membre fondateur du mouvement Pattern and Decoration. « Joyce s’est révoltée contre le minimalisme parce que ça devenait ennuyant et suranné », commente-t-il.

M. Parot retrouve son énergie créative non seulement auprès de ces grands maîtres, mais aussi des amateurs d’art à qui il fait visiter son atelier. « Faire de l’art, c’est un peu comme la mue d’un serpent. C’est fait dans la plus grande honnêteté; alors, pourquoi ne pas en parler?, demande-t-il. Quand je discute en tête-à-tête de mon travail, c’est une vraie joie pour moi. Je peux évaluer les goûts de mon interlocuteur, puis puiser dans mon bagage pour produire une nouvelle œuvre qui conviendra à merveille à un collectionneur. Les galeries d’art n’ont jamais accès à cette histoire. » Selon Parot, ce processus devrait être aussi sincère que l’œuvre elle-même. « L’achat d’un tableau ou d’un dessin devrait se faire à la suite d’une conversation exempte de secrets, de ruses et d’agendas cachés, déclare-t-il. Au bout du compte, l’achat d’une œuvre d’art va au-delà du prix et de la beauté; il découle d’un échange de vérité. »

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